- ARÔMES
- ARÔMESARÔMESEnsemble de composés volatils odorants émanant d’un aliment et perçu par la voie rétronasale lors de son absorption. Les arômes représentent une composante de la saveur, résultant elle-même de l’ensemble des sensations gustatives et olfactives. Ces molécules, dont la proportion globale dans un aliment peut varier de 10—4 à 10—10, sont perçues par un petit nombre de cellules réceptrices du bulbe olfactif qui constituent une surface de 2 à 3 centimètres carrés située dans le haut de la cavité nasale. L’image de l’odeur est ensuite transmise au cerveau, qui en perçoit la qualité et l’intensité selon des mécanismes complexes.Depuis 1967, le couplage de la chromatographie, en phase gazeuse à haute résolution, avec la spectrométrie de masse (C.P.G.-S.M.) a permis d’identifier plusieurs milliers de molécules (environ 5 000) dans les aliments (viandes, thé, café, cacao, boissons alcoolisées ou non, légumes, fruits, poissons et crustacés, champignons, épices, aromates, etc.). Le tabac détient le record avec plus de deux mille deux cents composés volatils. Presque toutes les catégories de composés chimiques, dont le poids moléculaire est inférieur à 400, sont présentes dans les arômes (excepté les dérivés nitrés et halogénés). En série aliphatique, hydrocarbures, éthers, aldéhydes, cétones, alcools, esters, acides, amines, sulfures, thiols et thioesters sont les principaux constituants de ces arômes. De nombreux dérivés cycliques (cyclotènes) et aromatiques (phénols) y sont présents. Mais la catégorie la plus importante est constituée par des hétérocycles (pyrazines, furannes, lactones, oxazoles, thiazoles, pyrroles, pyridines, pyrannes, pyrimidines et leurs dérivés condensés), environ deux mille produits. La présence dans ces cycles d’un ou de plusieurs hétéroatomes (O, S, N) leur confère des propriétés olfactives intéressantes utilisées dans l’industrie des arômes pour renforcer les arômes naturels qui ont perdu de leur puissance au cours des procédés de transformation. Leurs seuils olfactifs peuvent être extrêmement bas. Celui de la méthoxy-2 isobutyl-3 pyrazine est de 0,03 p.p.b. (partie pour billion) dans l’eau. Une dernière catégorie est constituée par des mono- et sesquiterpènes, principaux constituants des épices et des extraits végétaux aromatiques. À travers le vin, on peut mesurer toute la complexité des arômes. Ceux-ci, variétaux ou primaires, caractéristiques d’un cépage donné, peuvent présenter des notes fruitées (banane, cerise, framboise, fraise, mûre, coing, pomme) ou florales (tilleul, rose, églantine, violette, acacia, pivoine, genêt, etc.). À ces notes initiales va se superposer toute une série de notes nouvelles qui vont dépendre des procédés de manutention pendant les vendanges, de ceux de la vinification du moût au cours des fermentations alcooliques et malo-lactiques (arômes fermentaires) et, enfin, du temps et du mode de conservation du vin (arômes postfermentaires). Au cours de la phase de vieillissement en fût de chêne (de 18 mois à 2 ans pour les vins rouges de garde), des notes épicées, phénoliques, de vanille et de fruits cuits se développent.Les arômes sont formés dans les aliments naturels ou apprêtés selon deux voies distinctes.– Les processus enzymatiques et de fermentation . Ces réactions microbiologiques ont pour siège les constituants alimentaires fondamentaux: sucres, ribonucléotides, peptides, acides aminés, caroténoïdes, anthocyanes, vitamines, etc. Les enzymes impliquées dans ces processus sont principalement des hydrolases (protéases, carbohydrases, lipases) et isomérases. À l’état naturel ou immobilisées sur des supports variés (cellulose, collodion, verre poreux, collagène, Nylon), elles sont largement utilisées dans de nombreux secteurs de l’industrie alimentaire: viandes (hydrolysats de protéines végétales ou animales), poissons, produits de cuisson (pain et biscuit), jus de fruits et de légumes, boissons fermentées (vin et bière), lysages de hauts polymères (cellulose), etc.– Les processus de brunissement non enzymatique (réaction de Maillard). Les sucres réducteurs (glucose, fructose, etc.) et les acides aminés ou dipeptides en sont les précurseurs. Au cours de la cuisson, grillage, torréfaction, conservation ou stockage des aliments, ces derniers se combinent pour former des intermédiaires d’Amadori ou de Heyns, qui sont la clé de voûte de la chimie des arômes. Le stade ultime est la formation de pigments bruns à haut poids moléculaire, appelés mélanoïdines, et de composés volatils odorants formés à partir des composés carbonylés 見-hydroxylés, d’aldéhydes, d’ammoniac et d’hydrogène sulfuré libérés au cours de la réaction. La dégradation thermique des vitamines, la rupture oxydante des lipides sont également une source d’arôme.Aux méthodes d’extraction classiques telles que l’entraînement de la vapeur d’eau, l’extraction liquide-liquide aux solvants (pentane, chlorure de méthylène, solvants fluorés, etc.), l’adsorption sur un polymère poreux suivie d’une désorption chimique ou thermique est venue s’ajouter récemment une méthode d’extraction aux fluides supercritiques (CO2) qui n’altère pas la qualité odorante du produit de départ. L’identification des composants volatils de l’extrait est réalisée grâce à des banques de spectres de masse couplées avec le système C.P.G.-S.M. Elles permettent de comparer le spectre d’un «inconnu» à l’ensemble des spectres de référence contenus dans la mémoire d’un ordinateur. Une banque spécifique aux arômes et l’inclusion de filtres, comme les grandeurs chromatographiques (indices de Kovats), ou spectrométriques (U.V., I.R. et résonance magnétique nucléaire du proton ou R.M.N.-1 H), permet d’en accroître l’efficacité. Une technique complémentaire de la précédente est le couplage de la chromatographie en phase gazeuse avec la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier.La législation communautaire distingue trois catégories d’arômes : arômes naturels, identiques au naturel et artificiels. Il existe aussi une sous-catégorie ou arômes renforcés. La première catégorie englobe toute matière végétale ou animale utilisée soit en l’état, soit transformée en vue de la consommation humaine par des procédés culinaires usuels (séchage, torréfaction, fermentation, etc.), soit toute substance ou préparation obtenue par des procédés physiques, microbiologiques ou enzymatiques à partir des produits naturels définis précédemment. Les substances identiques au naturel sont obtenues par synthèse, et leur composition chimique doit être identique à celle des substances présentes naturellement (il y a ici une ambiguïté, car les experts ne semblent tenir compte ni de la configuration des molécules ni de l’abondance isotopique des atomes qui les composent). Les substances artificielles sont des produits de synthèse, mais non encore identifiés dans la nature. Les arômes renforcés répondent à des impératifs technologiques. Les arômes naturels (de fraise, par exemple) ne sont pas suffisamment puissants s’ils ne sont pas renforcés par ceux qui sont artificiels. L’arôme de noix de coco est rarement naturel. En France, les produits autorisés comme additifs aromatisants figurent dans le Codex alimentarius ; pour la Communauté européenne, ils se trouvent dans les Directives de la Communauté et dans le Livre bleu du Conseil de l’Europe, et aux États-Unis sur les listes F.E.M.A., G.R.A.S. (Flavoring Extract Manufacturer’s Association; General Recognized as Safe) visées par la F.D.A. (Food and Drug Administration).L’industrie de l’aromatique regroupe en France deux secteurs, celui de la parfumerie et celui des matières aromatiques pour les industries alimentaires et pharmaceutiques. Les industriels sont regroupés au sein du syndicat Fedarom (Fédération française des syndicats de l’aromatique) qui englobe le S.I.E.M.P.A. (Syndicat des importateurs et exportateurs de matières premières aromatiques) et le S.N.I.A.A. (Syndicat national des industries aromatiques alimentaires) sans oublier Prodarom, le Syndicat national des fabricants de produits aromatiques, dont le siège est à Grasse.Au niveau international, plusieurs organismes veillent à la réglementation et à la non-toxicité des saveurs et des fragrances. Ce sont, pour les fragrances, le R.I.F.M. (Research Institute for Fragrance Materials) et l’Ifra (International Fragrance Association) et, pour les saveurs, l’I.O.F.I. (International Organization of the Flavor Industry). Cette dernière regroupe les associations nationales des fabricants d’arômes du monde entier et entretient des relations avec le Bureau de liaison des syndicats européens des produits aromatiques. Au niveau communautaire, il existe la Commission économique européenne et le Conseil de l’Europe.L’industrie des arômes alimentaires est un secteur de pointe de l’aromatique. Cet essor concerne surtout les arômes de fruits exotiques, utilisés dans les boissons et les glaces, de viandes (potages instantanés, amuse-gueules), les arômes pour fromage et fines herbes, les arômes de poissons (saumon, homard, crevettes) et les arômes de produits laitiers frais.
Encyclopédie Universelle. 2012.